Au sujet d’une mine d’uranium en RD du Congo et du groupe nucléaire français Areva

Auteur

Ashado

Localisation

Congo

Année de publication

2009

Cet article est paru dans
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Non seulement la France n’est pas indépendante pour produire de l’énergie nucléaire comme ses dirigeants l’affirment, puisqu’elle doit importer du minerai d’uranium d’Afrique, mais elle suscite, pour cela, là-bas, des désastres humains et écologiques inouïs. ANV publie ici des extraits d’un rapport accablant.

La course au nucléaire, et par conséquent la course à l’uranium, s’accompagne d’un cortège de malheurs : des populations vivent sur les territoires convoités par les entreprises, légales et illégales, imposant la loi de la jungle ; la corruption étatique considère le sous-sol comme un compte bancaire personnel de ses quelques dirigeants, laissant ses ouvriers non protégés sombrer dans une pauvreté scandaleuse. L’uranium, en tête de la longue liste de la richesse du sous-sol, devient sur place un verdict d’esclavage et de mort. Pour ces raisons, la gouvernance des richesses naturelles est aussi un terrain d’action non-violente, en RDC et en France 1 . (...)


Le contexte


Dans le cadre de son programme « Ressources naturelles et bonne gouvernance », qui a comme mission de recenser les violations des droits de l’homme liées à l’exploitation des ressources naturelles, l’Association africaine de défense des droits de l’homme, depuis sa représentation du Katanga, Asadho/Katanga 2 , effectue des missions d’investigations dans le domaine minier afin de faire ressortir les atteintes aux droits fondamen- taux des individus et des communautés locales. (...)

À travers ce rapport, l’Asadho/Katanga reste soucieuse de contribuer à l’assainissement du secteur minier congolais, plus précisément dans la riche province du Katanga, où se déploie l’exploitation artisanale et industrielle de nombreux gisements riches en cuivre, cobalt, uranium, germanium, manganèse, cassitérite, etc. Ces exploitations n’ont jamais profité à la majorité du peuple congolais à cause du défaut d’application des principes élémentaires de bonne gouvernance et de transparence, corollaire d’une impunité et d’un enracinement généralisé de la corruption, entretenus par les institutions publiques concernées dans l’exploitation et la commercialisation de ces richesses naturelles.


Une corruption généralisée...


C’est dans ce contexte de désintérêt général que les représentants des pouvoirs publics congolais signent généralement des conventions minières léonines 3 en toute opacité avec des partenaires étrangers, qui soit sont enregistrés dans des paradis fiscaux, soit sont réputés violateurs des droits des communautés locales (cas du groupe nucléaire français Areva), etc. En RD Congo, la corruption étant devenue un mode de gestion de la Res publica, les OSC 4 congolaises devraient dénoncer les pratiques institutionnelles ne favorisant pas la transparence. Ces pratiques émanent des multinationales mondialement réputées comme violatrices des droits humains ou contribuant peu au développement social des communautés locales.

Le comble est que l’État congolais semble ne pas vouloir développer une politique nationale durable de préservation de la santé et d’amélioration des conditions sociales de ses gouvernés contre des substances minières fossiles nuisibles dont celles uranifères provenant de la mine de Shinkolobwe. Les enquêtes, et malgré des décisions publiques déjà prises 5 , rien ne change de la part des autorités militaires, judiciaires, administratives locales et même nationales.

Attendent-elles pour réagir un énième éboulement meurtrier dû à une exploitation artisanale incontrôlée sur ce site, ou une autre information diffusée mondialement sur un éventuel trafic d’uranium à partir de la RD Congo ?

Après un éboulement dans la mine en juillet 2004, faisant plus de 100 morts, ce qui a été médiatisé à l’étranger, une mission onusienne a été menée en octobre 2004 par le Groupe commun PNUE/BCAH (le Programme des Nations unies pour l’environnement et le Bureau de coordination des affaires humanitaires), afin d’effectuer une évaluation dans la mine uranifère de Shinkolobwe, suite à une demande du ministère congolais de la Solidarité et des Affaires humanitaires. Ladite mission avait constaté des risques importants liés à de possibles éboulements ainsi qu’à une potentielle exposition chronique à la radioactivité ionisante. Elle avait considéré que la mine de Shinkolobwe devrait être fermée définitivement.

En 2004, suite à des témoignages d’activités minières illégales à Shinkolobwe, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) avait estimé « inquiétante » la possibilité que de grandes quantités d’uranium soient extraites et exportées. Conformément à un accord de sauvegarde, et à un protocole d’accord additionnel, signé par le gouvernement congolais le 9 avril 2003, la RD Congo était déjà obligée de rendre compte de ses activités minières ainsi que de ses exportations d’uranium. (...)

Depuis longtemps, le gouvernement congolais joue donc le jeu de l’hypocrisie face à la communauté internationale, en ne prenant pas des dispositions utiles et durables en ce qui concerne l’interdiction d’accès à cette mine uranifère. Par ailleurs, il n’a jamais eu la volonté de prendre des mesures de sécurité afin d’assurer la protection des ouvriers face aux matériaux radioactifs dangereux en provenance de Shinkolobwe, alors que l’uranium et tous les minerais radioactifs congolais sont considérés comme des « substances réservées » par le Code minier congolais et ils devraient être soumis à des règles et dispositions spéciales pour leurs exploration et exploitation.

Les Nations unies, à travers le PNUE/BCAH et l’AIEA, ont pêché par négligence en n’effectuant aucun suivi rigoureux pour s’assurer que le gouvernement congolais ait pris des mesures de protection et de sécurité pour assurer la protection adéquate du matériau nucléaire et radioactif.

De nombreuses personnes ont continué et continuent donc à être irradiées par les produits miniers sortis clandestinement de Shinkolobwe.

C’est dans ce contexte que l’État congolais vient de signer en mars 2009, avec le groupe nucléaire français Areva, un accord, tenu secret jusque ce jour, sur l’exploration et l’exploitation de tout l’uranium congolais. (...)


La mine de Shinkolobwe, classée zone interdite en janvier 2004


Il reste que la dangerosité des gisements de Shinkolobwe a conduit le gouvernement congolais à prendre la décision les classer zone interdite à l’activité minière le 27 janvier 2004 6 . En effet, conformément à l’article 9 c de la loi n° 007/2002 portant sur le Code minier 7 , le président de la République Joseph Kabila Kabange avait signé le décret présidentiel n° 04/17 du 27/01/2004 portant sur le classement de Shinkolobwe comme zone interdite à l’activité minière.

Ce décret présidentiel n’a malheureusement pro- duit aucun effet escompté, car aucun mécanisme d’application n’a été réellement mis en place par les autorités congolaises qui ont continué à tolérer cette exploitation artisanale. Elle s’est donc poursuivie à la barbe des innombrables services publics présents sur ce site, dont l’Agence nationale des renseignements (ANR), et la police des mines et hydrocarbure. Tous ceux-là ont continué à percevoir, chacun à son niveau, des taxes illégales à travers leurs agents régulièrement affectés.

Des circuits mafieux tenus par des étrangers (Libanais, Nord-Coréens, Indiens, Pakistanais, Chinois) s’étaient organisés pour cela autour de l’exploitation du minerai de Shinkolobwe.

Il a fallu un éboulement meurtrier, fortement médiatisé sur les chaînes de télévision étrangères, pour que les pouvoirs publics congolais sortent de leur torpeur, reprennent soudainement conscience du danger d’irradiation et des conditions de travail inhumain concernant les 20 000 ouvriers. Ils se sont alors souvenu de la nécessité de rendre exécutoire l’esprit et la lettre du décret présidentiel n° 04/17, émanant de la plus haute autorité du pays !

C’est ainsi que toute la population du site de Shinkolobwe a été mise en demeure, par le gouverneur de la province du Katanga, d’évacuer les lieux avec un préavis d’une semaine à la suite duquel le village a été brûlé afin de dissuader tout retour éventuel. (...) Ceci se serait produit dans la première quinzaine du mois d’août 2004 8 . Tout un bataillon des policiers armés y avait été déployé pour incendier les différentes constructions de fortune qui avaient été érigées autour de la mine, afin de décourager d’y revenir les ouvriers-creuseurs et les tenants de petits négoces de ce lieu. (...) L’interdiction d’accès à Shinkolobwe ne fut dans la réalité que de très courte durée. (...)

 

L’accord entre le RD du Congo et Areva


Le 26 mars 2008, lors de la visite éclair du président français Nicolas Sarkozy, un accord important a été signé entre le ministre congolais des Mines, Martin Kabwelulu, et la présidente du directoire nucléaire français Areva, Anne Lauvergnon. Cet accord porte sur la recherche et l’exploitation de l’uranium sur le sol congolais. Il fut négocié en secret sur deux années. Son facilitateur a été M. Georges Arthur Forrest, consul honoraire de France à Lubumbashi, grand opérateur minier ayant eu à soutenir financièrement et logistiquement le parti présidentiel, le Parti du peuple pour la reconstruction et le développement (PPRD) lors de la campagne présidentielle en 2006. (...)

Les besoins en uranium en Europe devraient doubler d’ici 2030. La France, dont 80 % de l’électricité est produite par les centrales nucléaires de la société EDF, s’employait depuis longtemps à rechercher des partenariats en vue de sécuriser son approvisionnement nécessaire au fonctionnement de ses cinquante-huit réacteurs.

L’opportunité congolaise — grâce au consul honoraire M. Georges Arthur Forrest — a été donc une aubaine pour la France. (...) L’État français détient, directement et indirectement, plus de 90 % des titres émis par Areva.

Areva reste incontestablement le géant nucléaire mondial 9 : sa stratégie de groupe intégré sur toute la chaîne nucléaire le pousse à vendre un peu partout des réacteurs et leur combustible. Areva a ainsi vendu deux EPR (European Pressurized Reactor) à la grande compagnie d’électricité chinoise. Areva exploite des mines d’uranium au Canada et au Kazakhstan, entrevoit d’ouvrir une nouvelle mine avant 2010 en Namibie, effectue des travaux d’exploration dans plusieurs pays (dont le Sénégal, l’Afrique du Sud, la Mongolie, l’Australie, la Jordanie). Areva a extrait 6 300 tonnes d’uranium en 2008 — ce qui équivaut à 14 % de la part du marché mondial — et se propose d’accroître sa production jusqu’à 12 000 tonnes en 2012.

Néanmoins, pour l’Asadho/Katanga, il y a lieu de s’interroger sur l’engagement et l’expérience réels d’Areva en ce qui concerne le respect des principes de la responsabilité sociale des entreprises extractrices dans les pays du Sud, en Afrique, où les pouvoirs politiques sont généralement caractérisés par la corruption, ne se préoccupant guère de la sauvegarde des droits des communautés locales et signent des contrats léonins. (...)

Les données géologiques sur les concessions qui seront explorées et exploitées par Areva n’ont pas été actualisées et rendues publiques, autrement dit, ce filon réputé riche en uranium qui est ancré dans le « Copper Belt », n’a pas été préalablement évalué par la partie congolaise qui aurait dû l’estimer et donner sa valeur réelle ou approximative chiffrée avant de s’engager dans un quelconque partenariat. (...) Y avait-il péril en demeure pour l’État congolais de signer à la sauvette l’accord du 26 mars 2009 ? (...)

Areva a exploité et continue à exploiter d’autres gisements dans des pays africains, par exemple au Niger et au Gabon, où il est accusé généralement d’avoir pollué l’environnement, de ne pas garantir la santé de ses travailleurs et des communautés locales contre la radioactivité, d’appliquer une discrimination dans le traitement social entre travailleurs locaux et expatriés, etc.

 

Comment agir ?


Il convenait que voit le jour, en France, une commission parlementaire pour enquêter sur les activités d’Areva en Afrique. Les allégations, de plus en plus concordantes de mépris par Areva des principes et normes de responsabilités sociales dans ses activités en dehors du territoire français, ont amené quatre sénateurs français Verts à soumettre le 24 mars 2009 « une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur les méthodes mises en œuvre par Areva ou ses filières pour exploiter du minerai d’uranium hors des frontières françaises ». Ainsi, à travers cette proposition de résolution, ces sénateurs Verts réclament la transparence concernant les impacts des activités d’Areva sur la santé et l’environnement des communautés locales (prévention, précaution et suivi pour les sols, les puits, les nappes aquifères, les approvisionnements en nourriture,
 etc.). Ils demandent quelles interférences ont ces activités avec la démocratie.

La population congolaise, quant à elle, ne reste pas non plus inactive. La deuxième édition d’un Forum social congolais, qui s’est tenu fin juin 2009 à Lubumbashi, capitale du Katanga, montre la prise de conscience et la mobilisation collective et laisse espérer un changement. Le thème était : « Nos ressources naturelles : notre droit, notre dignité. Un autre Congo est possible. »

Plus de 3 000 personnes (représentants des ONG, associations, syndicats, travailleurs, confessions religieuses, mouvements des jeunes indépendants, ONG internationales, députés provinciaux et nationaux, professeurs, étudiants et autres) venues de toutes les provinces de la République démocratique du Congo, de la Belgique et de la Suède ont participé à la deuxième édition de ce Forum social congolais.

Ce Forum a débuté par une grande caravane populaire de solidarité avec les peuples du monde, victimes du néolibéralisme. Cette caravane a parcouru les principales artères de la ville cuprifère de Lubumbashi au rythme de la fanfare kimbanguiste et de propos dénonçant les causes de la paupérisation du peuple congolais. (...)

Ce deuxième Forum s’est clôturé sur 16 engagements et recommandations sur lesquels seront axées les actions du Secrétariat permanent du Forum social congolais. Il s’agit de :

  1. Militer pour une présence permanente des représentants des travailleurs dans les instances des prises de décisions les concernant.
  2. Renforcer le plaidoyer et la sensibilisation sur le travail décent en RDC.
  3. Construire et mener une campagne de plaidoyer sur les recommandations issues du FSC.
  4. Construire un programme, dans la société civile, pour la surveillance des recettes et dépenses publiques.
  5. Mettre en place une forme d’observatoire sur les droits économiques et sociaux dont un des rôles essentiels sera la recherche et le partage d’informations.
  6. Renforcer le plaidoyer pour l’annulation de la dette de la RDC envers les bailleurs des fonds bilatéraux et multilatéraux.
  7. Mettre en place un Observatoire national de la jeunesse avec des ramifications provinciales
  8. Susciter l’organisation des forums sociaux locaux sur l’ensemble du territoire national.
  9. Militer pour une loi sur la transparence des ressources naturelles.
  10. Encourager l’encadrement et l’organisation des creuseurs artisanaux et renforcer la vulgarisation du Code minier.
  11. Organiser un plaidoyer à tous les niveaux pour l’augmentation de la part da l’agriculture dans les budgets de l’État.
  12. Construire et mener un plaidoyer pour le Code agricole.
  13. Favoriser et appuyer la mise en place d’un cadre de concertation et de renforcement des magistrats.
  14. Réaliser une table ronde pour réfléchir sur les conditions de travail des magistrats.
  15. Construire et mener un plaidoyer pour une loi sur la police
  16. Réaliser un troisième Forum social congolais.

Déjà un million de Chinois en Afrique

Dans le remue-ménage de la crise, les grands seigneurs de la planète se tiennent encore cois. Mais il est un géant — la Chine — dont les ambitions s’étalent. Sans fracas, méthodiquement, massivement, la Chine aborde l’Afrique, toute l’Afrique, avec un appétit d’ogre. D’un ogre patient. (...)

Chine-Afrique : comme pour l’œuf de Christophe Colomb, il suffit d’effriter aux deux bouts nos préjugés pour faire tenir debout cette chimère de moins en moins chimérique. Car l’Afrique, en tant que continent, « décolle ». Quant à la Chine, elle dispose, pour l’investir, d’atouts encore sous-estimés. On trouve aujourd’hui un million de Chinois en Afrique. Et, entre l’Afrique et la Chine, 100 milliards annuels de dollars s’échangent. L’invasion pacifique a commencé.

« L’Afrique est mal partie. » C’est à ce vieux cliché qu’avec ignorance ou dépit postcolonial nous restons rivés. Or, depuis une dizaine d’années, elle « part ». Son taux de croissance moyen y avoisine par an 5 %, soit trois fois plus que la croissance moyenne de la zone euro. C’est d’abord la manne pétrolière qui nourrit cette envolée. Et qui fit, ainsi, d’un paralytique du continent — l’Angola — un athlète de la croissance. Certes, la baisse du prix du pétrole et des matières premières ralentit aujourd’hui cet essor, mais l’Afrique subira moins que nous la contagion de la crise financière. (...)

C’est évidemment son pactole actuel — et futur — qui excite la Chine. Pékin, affamé de pétrole, importe déjà d’Afrique près de 20 % de sa consommation. Et submerge le continent de contrats miniers à long terme, dont le plus important avec le riche Zaïre et son Katanga. En échange, il construit des routes, chemins de fer, réseaux d’eau et d’électricité, ports, hôpitaux, stades... et des résidences somptuaires pour les ministres complaisants.

Pour cette conquête postcoloniale, la Chine aligne un triplé d’atouts qui n’appartiennent qu’à elle. D’abord, son capital humain. Elle exporte quelques banquiers, médecins et ingénieurs, mais surtout, et au coup par coup, des dizaines de milliers de manœuvres asservis à des conditions plus que spartiates. D’aucuns, leur office accompli, s’établissent en épiciers, garagistes ou vendeurs de beignets. La Chine, qui s’inquiète des millions de misérables errant encore dans ses propres campagnes, encourage cet exutoire.

Deuxième atout, cynique mais efficace : la Chine néglige la « bonne gouvernance » de ses hôtes et le souci démocratique prisé par l’Occident. Tous les despotes lui conviennent pourvu qu’ils lui sourient !

Enfin, dernier « joker », l’État chinois, assis sur ses réserves financières, garantit à 48 États d’Afrique noire des prêts léonins qui se soucient comme de colin tampon des normes du FMI ou de l’OMC. Si, en cinq ans, le président chinois Hu Jintao a visité, en 4 voyages, 18 États africains, ce ne fut pas pour le tourisme. Outre les acquis empochés dans la vaste foire d’empoigne des matières premières, la Chine peut déjà compter à l’ONU plus de soutiens africains que la France...

Comment réagissent les Français ? Certains, avec un sage fatalisme, constatent que l’offensive chinoise éveille le continent et l’ouvre aux investissements du monde entier. Ces concurrences nouvelles n’empêchent pas des groupes français — tel Bolloré — d’y prospérer, voire d’y élargir leur emprise. Et puis, bien sûr, il reste à la France le privilège de la francophonie et les cousinages, décriés mais fructueux, de la « Françafrique » : on ne jette pas le manche après la cognée, ni l’oncle Bongo après l’autodafé colonial...

D’autres Français sont moins enclins à la bienveillance. Ils croient que les Chinois mangent leur pain blanc en premier. Contre eux, des révoltes locales se sont levées au Zimbabwe, en Éthiopie, au Congo. Les matrones de Cotonou ou de Dakar déblatèrent le petit commerce chinois. L’Angola commence de broncher devant les prétentions de Pékin. La presse africaine gronde de plus en plus. Et l’État français découvre que, dans l’aide française à l’Afrique, le contribuable enrichit, par le truchement des appels d’offres... la mainmise chinoise. Entre les Chinois — qui n’apprennent en masse ni l’anglais ni le français — et les Africains, pas de mariages et peu de connivences individuelles ! Bref, attendons : on ne saura guère que dans vingt ans ce que l’Afrique réserve aux fils du Ciel.

Voyons, en tout cas, que, dans le monde, les conquêtes nouvelles n’obéiront pas à nos critères bénins. Elles se feront selon d’éternelles lignes de force : par la démographie, la volonté hégémonique, le courage, le travail et le temps. En Afrique, ce temps-là ne sied pas aux cigales. Il sied aux fourmis, et la Chine a ce qu’il faut.

Extrait de l’article « Chine-Afrique : noces d’or » de Claude Imbert, publié dans Le Point n° 1910 du 23 avril 2009.


Pratiquer la non-violence à trois niveaux

Face à la violence du néocolonialisme, en quoi consiste la non-violence de celles et ceux qui veulent s’en défaire ? D’abord dans le principe même de la non-violence gandhienne, l’ahimsa (du privatif a – et – himsa : nuisance) : ne pas nuire. Commençons donc par cesser de nuire aux pays sous domination, en cessant d’alimenter celle-ci par notre consommation et notre mode de vie au Nord, avant de monter des missions pour venir « aider » à colmater les brèches que nous ouvrons. Cessons d’alimenter la violence. La deuxième signification de la non-violence dans notre contexte d’impérialisme, est de lutter et d’établir des rapports de force non-violents face aux acteurs identifiés de cet impérialisme (lobbys et multinationales de l’agroalimentaire, des carburants, système politique de la Françafrique, etc.) afin de faire tomber leur hégémonie par la non-coopération. La troisième dimension de cette non-violence est l’établissement d’un programme constructif qui permette non seulement de faire tomber le système qui détruit, mais aussi d’imaginer l’organisation à mettre en place pour lui succéder et permettre de répondre aux besoins qu’il remplissait peu ou prou.

Extrait de l’article « Décolonisons... nos modes de vie ! », de Guillaume Gamblin, paru dans Silence n° 361, octobre 2008. (Silence, 9 rue Dumenge, 69317 Lyon Cedex 04. Tel. : 04 78 39 55 33)


1) Certaines notes en bas de page sont ici dans ANV suivies d’un nombre mis entre parenthèses. Ils correspondent au nombre de la note en bas de page dans la version complète du rapport.
2) Ses bureaux sont installés dans la riche province minière du Sud de la RD Congo.`   
3) Congolaises de la RDC.
4) Organisations de la société civile.

5) L’Asadho/Katanga relève que déjà en janvier 2004, le président de la République Joseph Kabila avait signé le décret présidentiel n° 04/17 du 27/01/2004 portant classement de Shinkolobwe comme zone interdite à l’activité minière.

6) (10) Communiqué presse n° 10/CAB/GP/KAT/2006, précité, p. 2.
7) (11) Cet article stipule que le président de la République est compétent pour déclarer, classer ou déclasser une zone interdite à l’activité minière ou aux travaux de carrières.
 8) (12) Joint UNEP/OCHA Environment Unit : « Mine uranifère de Shinkolobwe, Mission d’évaluation de la situation humanitaire », novembre 2004, p. 7.

9) (25) D’après Areva, en 2008, ses investissements opérationnels bruts se sont élevés à 1 756 millions d’euros
(1 454 millions d’euros nets de cessions) à comparer à 2 928 millions d’euros en 2007 (2 889 millions d’euros nets de cessions).

 

ASADHO est une association africaine de défense des droits de l’homme en RDC. ANV présente ici des extraits du rapport publié par cette association le 14 juillet 2009, dans le cadre de son Programme de recherches en ressources naturelles et bonne gouvernance.


Article écrit par Ashado.

Article paru dans le numéro 152 d’Alternatives non-violentes.