Auteur

François Vaillant

Année de publication

2002

Cet article est paru dans
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Étrange époque ! Le gouvernement ferme des écoles et construit des prisons ! Il est temps d’interroger la non-violence et le sens qu’elle donne à la sanction éducative. À terme, on devrait réouvrir des écoles et fermer des prisons ; d’une part quand des José Bové y séjournent injustement et d’autre part parce que la prison n’a jamais éduqué (cf. ANV n° 106).

D’une manière générale, l’usage du châtiment ou de la punition sont un aveu de faiblesse, car, en dehors de la colère non maîtrisée qu’elles manifestent, elles indiquent toutes deux l’incapacité à vouloir dialoguer, et à faire comprendre la gravité que recèle la déso- béissance à une loi ou une règle.

Un châtiment châtie avec violence physique, une punition punit bêtement et souvent méchamment. À quoi sert de frapper un enfant ou de lui faire copier cent lignes, sinon à manifester son pouvoir d’adulte sur plus faible que soi ? Le châtiment et la punition resteront toujours étrangères à une dynamique non-violente. Il en va différemment de la sanction. Il convient absolument de différencier châtiment, punition et sanction.

Quand un policier me verbalise quand j’enfreins le code de la route, il ne commence pas par me taper dessus ou à m’injurier. Il commence par me saluer, normalement avec respect ! Puis il me demande si je reconnais mon infraction. Je suis libre de ma réponse. S’il m’assigne une contravention, c’est qu’il estime que mon flagrant délit est répréhensible. Je suis alors contraint à payer une amende, ce qui va me faire réfléchir. Remarquons au passage que j’ai la possibilité de critiquer la sanction infligée, en recourant par écrit au tribunal de police, dans un délai de trente jours, pour contester la véracité des faits ou rendre compte de circonstances atténuantes.

Que l’on soit enfant, adolescent ou adulte, nous avons toujours besoin d’être éduqué ! Non aux fausses « bonnes manières » d’une bourgeoisie devenue grossière dans les coulisses et féroce dans les rapports sociaux. Le mépris d’autrui reste une faute de jugement, nous rappelle Sénèque, pour qui, « humilier autrui consiste toujours à se surestimer » !

Nul ne peut vivre en famille, à l’école, dans la rue, sans respecter des lois et des règles, à moins de se prendre pour un dieu ou une bête (Aristote). Ces lois et ces règles ont tout intérêt à être fondées, claires, compréhensibles, et acceptées par tout à chacun. Sinon la désobéissance non-violente s’impose pour les faire modifier (cf. ANV n° 108).

Une sanction éducative manifeste une contrainte. Il est temps de savourer la richesse de la langue française, pour qui « contrainte » n’est pas synonyme de « violence ». La contrainte s’impose quand l’ explication n’ a pas suffi. Si j’ en viens à interdire formellement à mes enfants de regarder la télévision après dix-huit heures, je ne leur fais pas violence, mais je les contrains à une règle pour qu’ils comprennent qu’il n’y a pas que la télévision dans la vie ! Et cela aura d’autant plus de sens pour eux que je regarde peu la télévision !

La famille, l’école, la vie publique ont besoin de règles et de lois pour que chacun soit invité à disposer de repères pour vivre en harmonie avec soi-même et autrui. En cas d’irrespect, la sanction s’impose après avoir été parlée. À la différence du châtiment ou de la punition, elle n’humilie pas celui qui la reçoit ni celui qui la donne. Elle ne vise nullement la soumission, mais la compréhen- sion de la volonté éducative.

Toute sanction, proportionnée à l’acte répré- hensible, est pédagogique, car elle cherche à faire comprendre ce qui équitable et humanisant, tout en cherchant à réparer le tort causé à autrui. Il est temps de questionner nos comportements et ceux d’autrui pour que grandisse la régulation non-violente des conflits !

François VAILLANT


Article écrit par François Vaillant.

Article paru dans le numéro 125 d’Alternatives non-violentes.