Auteur

Guillaume Gamblin

Année de publication

2005

Cet article est paru dans
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Il est difficile d’évoquer la non-violence sans penser aux expériences de résistance que nous a offertes l’histoire, et à leurs leaders, de Gandhi au Dalaï Lama. Le débat se porte ensuite généralement sur l’efficacité et la légitimité des modes d’action strictement non-violents, tout en évaluant la pertinence et
la valeur du principe de non-violence. Entre principe éthique et pratiques politiques, on oublie bien souvent un facteur qui joue pourtant un rôle essentiel dans la naissance et la force des expériences historiques de non-violence : ce sont les organisations qui portent et permettent ces mobilisations, lesquelles garantissent à ce principe éthique une actualisation dans l’histoire.

Quelques lecteurs isolés de Tolstoï ou Gandhi n’auraient pu à eux seuls offrir à la lutte des objecteurs de conscience une continuité durant les soixante années nécessaires à son aboutissement. Il aura fallu la naissance d’organisations per- mettant aux personnes portant des convictions non-violentes de partager, échanger, se renforcer mutuellement ; de se former, réfléchir, informer et agir... La non-violence est avant tout une aventure collective, vécue dans la continuité au-delà des seuls temps forts de mobilisation qui l’ont fait connaître (lutte du Larzac, sauvegarde de l’environnement...).

Nombreuses sont les organisations qui sont nées de la volonté de faire connaître la non-violence et de la nécessité de la faire valoir comme force active capable de modifier le cours de l’histoire pour plus de justice. En France, ces diverses organisations (mouvements militants, ONG, centres de recherche, de formation, de ressources...) se sont sans cesse entrecroisés dans une interaction constante. Les différents courants de la non-violence : politique, communautaire, évangélique, expérimentent sur le terrain une coopération dans le respect de la différence.

Connaître la non-violence, c’est donc aussi connaître ces organisations qui la portent et lui permettent de s’incarner dans l’histoire et dans la culture. Ce dos- sier est précisément le fruit d’une enquête réalisée depuis 2003 sur neuf des principales organisations françaises pour la non-violence ; il veut mettre en regard la richesse d’une histoire singulière et commune, et un panorama des ressources actuelles, en rendant compte des évolutions et de la dynamique de ces organisations. Le détour par la mémoire permet d’éclairer les richesses du présent et d’avoir une meilleure intelligence d’un avenir à écrire.

Le classement chronologique permet de prendre conscience des évolutions depuis 1923, avec à l’origine des motivations essentiellement chrétiennes et religieuses (Mir, Arche), puis le passage à l’action non-violente avec son introduction dans le champ politique au cours des années 1970 (Man, ANV), et enfin dans la notion de culture et d’éducation dès 1980-90 (NVA, Ifman...). En lisant ces expériences, on découvre que la petite histoire rejoint bien souvent la grande Histoire. À travers les évolutions et les combats de ces organisations, on voit en effet défiler une partie de l’Histoire des dernières décennies à travers un angle inédit : celui des résistancesqui refusent avec fougue tant les barbaries que les injustices de tous ordres.

Cette enquête est le fruit d’un travail réalisé en collaboration étroite avec Non-Violence XXI et la Fondation Charles Léopold Mayer pour le progrès de l’Homme(FPH). Les neuf organisations françaises qui sont présentées ici sont membres de Non-Violence XXI. Deux membres très récents de Non-Violence XXI n’ont pu être incorporés à ce dossier d’ANV : il s’agit de Génération médiateurs, qui fournit un travail important d’intervention pour la médiation en milieu scolaire, et desBrigades de paix internationales (PBI), qui envoient depuis plus de vingt ans des volontaires pour des missions d’intervention civile dans de nombreux pays (Mexique, Colombie, Indonésie...).

Ce travail n’aurait pu être accompli sans la coopération chaleureuse des membres de Non-Violence XXI et de la FPH d’une part, et des membres des orga- nisations non-violentes d’autre part : en particulier Anne-Isabelle Legeay, Laurence Milliat, Christian Brunier, François Lhopiteau, Anna Massina, Jean- Marie Muller, Jean-Baptiste Libouban, Christian Renoux, Hervé Ott, François Marchand, Guy Boubault, Pierre et Martine Dufour, N’Zinga Verdier, François Vaillant, Pierre Calame, Richard Pétris, Nicolas Haeringer, Vincent Calame et Juliette Décoster. Qu’ils en soient tous et toutes chaleureusement remerciés.

Guillaume GAMBLIN

 


Article écrit par Guillaume Gamblin.

Article paru dans le numéro 134 d’Alternatives non-violentes.